Poirier, N., & Cappe, É. (2016). Les dispositifs scolaires québécois et français offerts aux élèves ayant un trouble du spectre de l’autisme. Bulletin de psychologie, Numéro 544(4), 267‑278.
Cet article appelle sans doute quelques commentaires et quelques nuances.
Il
a le mérite de mettre en évidence qu'il y a encore des progrès à
accomplir pour la scolarisation des élèves autistes de part et d'autre
de l'Atlantique.
Pour ce qui est de la situation française, il me semble qu'il faut tenir compte des limites suivantes :
-
le ministère ne recense pas les élèves selon leurs pathologies mais
selon les troubles ayant une incidence sur leurs apprentissages. C'est
un choix quasi éthique - louable car il vise à ne pas médicaliser
l'approche - mais qui a quelques inconvénients pour sa lisibilité.
Résultat : ce sont les associations qui tiennent les comptes. Elles le
font en fonction de leurs intérêts, ce qui peut aboutir à quelques
exagérations. Ainsi "En France, il semblerait, d’après le Collectif
autisme, que 50 % des
enfants avec TSA n’auraient accès à aucune forme de scolarisation." me
semble à prendre avec précaution car la tranche d'âge considérée n'est pas
précisée.
-
le taux de scolarisation au Québec est relativement fort en comparaison
dans la mesure où l'école (tous types d'écoles) est le seul lieu
d'accueil des élèves. Mais nous voyons bien que la seule présence d'un
enfant dans une école ne garantit pas qu'il y soit vraiment scolarisé,
qu'il y reçoive un enseignement à haute valeur pédagogique à temps
plein. Dans les établissements médico-sociaux français les enfants sont
pris en charge par des éducateurs qui font un travail très semblable à
celui que je vois dans les écoles spécialisées du Québec. Quant à ce qui
se fait dans les classes d'adaptation scolaire québécoises, on peut
parfois regretter que soit négligée une éducation globale propre à
soutenir la participation sociale des futurs adultes au profit
d'apprentissages notionnels n'ayant pas grand sens ni intérêt. Au final,
ce que j'ai pu observer ici et là me donne à penser que les bonnes et
les mauvaises pratiques ne sont pas si différentes ni en quantité ni en
qualité.
-
la formation des enseignants : les deux systèmes sont difficilement
comparables. Au Québec, tous les enseignants de l'adaptation scolaire
ont un "bac en adaptation scolaire" qui les différencie d'emblée de
leurs collègues généralistes. Cette prédestination est ambivalente. Elle
a l'avantage de porter l'attention sur les particularités des publics
scolaires mais elle a l'inconvénient d'être assez faiblement
instrumentée sur les plans de la pédagogie générale de la maîtrise des
savoirs disciplinaires et de la didactique. En France, tous les
enseignants sont formés au niveau master 2 en tronc commun (un peu comme
leurs homologues généralistes québécois) et font en cours de carrière
le choix d'un poste en classe spécialisée. On peut considérer que dans
leur première affectation ils ne sont pas formés mais cela est souvent
largement compensé par la volonté d'y aller. Et c'est rendu à ce poste
que l'enseignant(e) demande à entrer en formation spécialisée pour
obtenir le CAPA-SH, formation en alternance dont il ou elle tire un
profit avivé par la confrontation à une authentique situation
professionnelle. C'est l'expérience que j'ai faite et ce que j'ai pu
constater en observant les 28 collègues avec lesquel(le)s j'ai fait ma
formation.